- Les besoins de sommeil de l’enfant de 6 à 13 ans sont compris entre 11h et 9h respectivement, avec une variabilité interindividuelle de plus ou moins 2h.
- Après 5 ans, les difficultés de sommeil reliées à l’insomnie se manifestent principalement par des difficultés d’endormissement et une opposition au coucher.
- On parle d’insomnie quand les troubles persistent depuis plus de 3 mois à une fréquence d’au moins 3 épisodes par semaine.
- Il s’agit d’un trouble fréquent chez l’enfant. La prévalence de l’insomnie est estimée entre 16 et 27% entre 6 et 12 ans. C’est la tranche d’âge la moins touchée par le trouble.
A quoi ressemble l’insomnie de l’enfant ?
Enjeux de la prise en charge
- En l’absence de prise en charge, il existe un risque important de persistance des troubles à l’âge adulte
- Les troubles du sommeil entrainent des difficultés de concentration et de mémorisation, des troubles du comportement et favorisent les troubles métaboliques à long terme
- Les problèmes de sommeil ont également un impact sur l’équilibre familial
Causes de l’insomnie de l’enfant d’âge scolaire
Difficultés d’endormissement/opposition au coucher
- Décalage de phase (« Couche-tard »)
- Besoins de sommeil surestimés
- Anxiété/peurs
- Trouble du conditionnement persistant : l’enfant ne sait pas s’endormir seul
- Mauvaise hygiène du sommeil
Réveils nocturnes
- Trouble du conditionnement persistant : l’enfant ne sait pas s’endormir seul. En cas de réveil nocturne, il réveille ses parents pour pouvoir se rendormir
- Besoins de sommeil surestimés
Que faire ?
Proposer une consultation dédiée et objectiver le trouble
Faire remplir un agenda du sommeil en prévision de la consultation :
Exemple d’agenda du sommeil
Méthode de remplissage :
- Pendant 10 à 15 jours le matin au réveil (évaluation de la nuit) et le soir au coucher (évaluation de la journée)
- Noter la date dans la colonne de gauche
- ↓ Pour l’heure à laquelle l’enfant est mis au lit (même si l’endormissement n’est pas immédiat)
- Hachurer les heures de sommeil au cours de la nuit
- ↑ pour l’heure de lever
- En cas de lever durant la nuit/sieste durant la journée, réutiliser le même système pour chaque lever/coucher et chaque période de sommeil
- Vous pouvez préciser par des remarques éventuelles (nuit hors du domicile, occasion particulière, épisode de terreur ou de cauchemars, fièvre, etc.)
- « S » pour les périodes de somnolence durant la journée
Éliminer une insomnie symptomatique
Opposition au coucher prédominante : |
- Syndrome des jambes sans repos : Douleurs/fourmillements/picotements des membres +/- mouvements périodiques des jambes associés |
Difficultés d’endormissement prédominantes : |
- Affection dermatologique |
Réveils nocturnes prédominants : |
- Syndrome d’apnées du sommeil : ronflements, hypersudation, énurésie secondaire… |
Rechercher des erreurs d’hygiène du sommeil
- Les horaires de coucher/lever doivent rester réguliers notamment les week-ends ou les jours sans contraintes.
Il est déconseillé de laisser un enfant « récupérer » en dormant plus longtemps le matin ou en faisant des siestes dans la journée après une mauvaise nuit (hors pathologies aiguës ou situations exceptionnelles) - L’exposition aux écrans doit être limitée
- Les siestes disparaissent généralement entre 3 et 6 ans. Elles peuvent persister jusqu'à 7 ans le week-end.
- L’activité physique journalière doit être suffisante
- Le coucher doit être précédé d’un court rituel de 10 à 15 minutes au maximum comprenant des activités douces et calmes (histoire, lecture, câlin...). Le rituel sert de repère pour l’enfant.
- Les prises alimentaires et les boissons doivent être dissociées du coucher. Au-delà de 6 mois, l’enfant n’a plus besoin de manger la nuit, et la prise de boissons nocturnes provoque une distension vésicale favorisant les réveils.
- L’utilisation d’un objet transitionnel (« doudou ») peut être une aide à l’endormissement
- L’usage de la tétine est déconseillé après l’âge de 12 mois
- L’environnement de sommeil doit être adéquat :
- Endormissement dans son propre lit, dans sa chambre
- Absence d’écrans dans la chambre à coucher (y compris téléphone)
- Environnement sombre et calme
- En cas de nécessité, veilleuse de faible luminosité (< 10 Lux)
Rechercher une inadéquation du temps de sommeil aux besoins individuels de l’enfant
- L’enfant est un « court dormeur », il a besoin de moins de sommeil que ce qu’on lui impose. Signes évocateurs :
- L’enfant met du temps à s’endormir (plus de 20 minutes) mais ne se réveille pas plus tard le matin
- L’enfant se réveille précocement, et ne se rendort pas ensuite.
- L’enfant qui présente ces signes est en forme durant la journée
- Si l’enfant se réveille en 2ème partie de nuit pour rejoindre la chambre de ses parents et y terminer sa nuit, il s’agit d’un problème de limites ou de peurs et non d’une inadéquation du temps de sommeil
Apprendre à s’endormir ou se rendormir seul
- Insister sur l’instauration de limites claires et stables dans le temps. Elles devront être appliquées quelle que soit la situation ou la personne en charge de l’enfant.
- Il doit être expliqué clairement à l’enfant ce qu’on attend de lui et les raisons du changement (ex : « Il est important que tu dormes suffisamment pour que tu sois en forme la journée, tu es capable de t’endormir seul, nous sommes là, nous allons t’aider. »)
- Les mesures d’hygiène du sommeil évoquées ci-dessus doivent être respectées
- En cas de demandes répétées, on peut mettre en place un système de jetons ou de demandes ; après 2 ou 3 demandes, les suivantes seront ignorées jusqu’au lendemain matin.
- L’application des méthodes comportementales d’extinction progressive et de sevrage de la présence parentale reste possible :
Extinction progressive : Méthode des 5’-10’-15’ |
Réduction progressive de la présence parentale |
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- Coucher l’enfant après le rituel et quitter la chambre avant l’endormissement |
Attendre que l’enfant s’endorme en s’éloignant progressivement du lit tous les 3 à 7 jours.
|
- Il faut compter 10 à 15 jours pour obtenir une efficacité
- Les pleurs et les manifestations d’opposition peuvent dans un premier temps s’intensifier, les parents doivent y être préparés
- Un système de récompenses et une valorisation des réussites est à prévoir en accord avec l’enfant
- Une prise en charge de type cognitivo-comportementales est indiquée
- Les peurs sont fréquentes dans cette tranche d’âge : peur du noir, cauchemars, illusions hypnagogiques* (*infobulle : illusion sonore ou visuelle provoquée par un son ou une image bien réelle), angoisse de séparation
- Encourager la verbalisation des craintes, rationaliser les peurs, rassurer l’enfant
- L’utilisation d’une veilleuse de faible intensite (< 10 Luc) peut être utile en cas de peur de l’obscurité. Elle ne doit pas être éteinte durant la nuit afin de maintenir des conditions similaires entre l’endormissement et les micro-éveils survenant entre les cycles.
- Un accompagnement par un psychothérapeute peut être une aide.
Prendre en charge les difficultés d’endormissement liées au décalage de phase
- Lorsqu’il existe un décalage de phase, l’enfant peine à s’endormir avec un endormissement tardif. Le réveil spontané est également retardé.
- Cela engendre une exposition trop tardive à la lumière artificielle qui interfère avec la sécrétion de mélatonine et perpétue le trouble.
- Risque pour l’enfant d’associer le lit à une situation anxiogène et indésirable.
- Mesures applicables :
Mesures générales | Avance de l’heure du coucher (« fading ») |
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Rétablir des horaires de levers matinaux réguliers, y compris les jours sans contraintes. |
- Décaler le coucher à l’horaire auquel l’enfant s’endort habituellement |
En cas d’échec ?
- Absence d’indication de traitements médicamenteux chez l’enfant
- Orientation vers un spécialiste en médecine du sommeil pour discuter de la nécessité d’examens complémentaires et des mesures associées possibles
Sources
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2. Activité physique et santé [Internet]. Ministère des Solidarités et de la Santé. 2022 [cité 20 janv 2022]. Disponible ici
3. Behavioral Treatment of Bedtime Problems and Night Wakings in Infants and Young Children. Sleep [Internet]. 1 oct 2006 [cité 16 janv 2022]; Disponible ici
4. American Academy of Sleep Medicine, Société Française de Recherche et Médecine du Sommeil. Classification Internationale des Pathologies du Sommeil. Traduite de L’International Classification of Sleep Disorders third version. 3ème Edition. 2014.
5. Mindell JA, Meltzer LJ, Carskadon MA, Chervin RD. Developmental aspects of sleep hygiene: Findings from the 2004 National Sleep Foundation Sleep in America Poll. Sleep Medicine. août 2009;10(7):771‑9.
6. Martello E. Enfin je dors... et mes parents aussi. 2ème édition. Editions du CHU Sainte-Justine. 2018.
7. Galland BC, Mitchell EA. Helping children sleep. Archives of Disease in Childhood. 1 oct 2010;95(10):850‑3.
8. Turgeon, Lyse P Sophie. Intervention cognitivo-comportementale auprès des enfants et des adolescents. Presses de l’Université du Québec. 2012.
9. Thirion M, Challamel M-J. Le sommeil, le rêve et l’enfant. Albin Michel. 2011.
10. Dauvilliers Y. Les troubles du sommeil. Elsevier Health Sciences; 2019. 457 p.
11. Galland BC, Taylor BJ, Elder DE, Herbison P. Normal sleep patterns in infants and children: A systematic review of observational studies. Sleep Medicine Reviews. juin 2012;16(3):213‑22.
12. Lima RB dos S, Dias AJL, Barbosa LP. Overview of clinical trial protocols for behavioral insomnia in infants. Rev Bras Enferm. 2021;74(suppl 4):e20200769.
13. Prise en charge des insomnies du jeune enfant. mt pédiatrie. 2013;(16(2)):97‑107.
14. Kuhn BR, Elliott AJ. Treatment efficacy in behavioral pediatric sleep medicine. Journal of Psychosomatic Research. juin 2003;54(6):587‑97.