Syndrome d'apnées obstructives du sommeil de l'enfant
paragraphe
Définition
SAOS : Réduction anatomique ou fonctionnelle du calibre des voies aériennes supérieure durant le sommeil provoquant une gêne (hypopnée) voir un arrêt complet de la respiration pendant quelques secondes (apnée).
Cela engendre un défaut d’oxygénation et une hypercapnie temporaire qui peuvent favoriser les micro-éveils, et perturber la structure du sommeil.
Conséquences (en l’absence de diagnostic et de traitement approprié) :
A court terme : Augmentation du risque de parasomnieset réveils nocturnes, énurésie nocturne (le plus souvent secondaire), hyperactivité, troubles de la concentration ou au contraire, somnolence diurne, réveils difficiles, cassure de la courbe de croissance par hypercatabolisme
A long terme : Augmentation du risque d’obésité, de pathologies cardio-vasculaires (HTA, diabète, dyslipidémies, insuffisance cardiaque et HTAP), psychiatriques (syndrome dépressif).
Prévalence : 1 à 4% (pic de fréquence entre 3 et 6 ans)
Trois types distincts de syndrome d’apnées obstructives du sommeil de l’enfant selon leurs manifestations cliniques et leurs origines :
Type 1 : SAOS de l’enfant jeune, sans surcharge pondérale ou comorbidités, présentant un obstacle ORL (hypertrophie des végétations adénoides et/ou des amygdales)
Type 2 : SAOS de l’enfant obèse, souvent plus âgé, sans hypertrophie adénoido-amygdalienne évidente. Il se rapproche du SAOS de l’adulte.
Type 3 : SAOS de l’enfant porteur de pathologies neuromusculaires, malformatives ou génétiques (Trisomie 21, achondroplasie, syndrome de Pierre-Robin…)
Les étiologies des types 1 et 2 sont complexes et encore mal connues. Il s’agirait d’une combinaison de facteurs environnementaux, génétiques et intrinsèques.
Apnées d’origine centrale : Le syndrome d’hypoventilation alvéolaire centrale congénital (Syndrome d’Ondine)
Pathologie rare (1/200 000 naissances)
Atteinte sévère du contrôle nerveux autonome des centres respiratoires d’origine neurologique survenant préférentiellement pendant le sommeil calme
Nécessité d’assistance respiratoire le plus souvent permanente, dès la naissance
Diagnostic à la naissance le plus souvent, exceptionnellement évoqué en soins primaires.
Quand évoquer le diagnostic ?
Faisceau d’éléments recueillis par l’interrogatoire, l’examen clinique et les données anthropométriques
Signes cliniques en rapport avec l’obstruction des voies aériennes et/ou avec la mauvaise qualité de sommeil.
Symptômes nocturnes
Symptômes diurnes
Signes cliniques
Facteurs de risque
Ronflements nocturnes fréquents (plus de 3 fois par semaine depuis plus de 3 mois), sonores (porte fermée)
Respiration laborieuse
Irrégularité respiratoire ou apnées
Inquiétude parentale concernant la respiration nocturne
Respiration buccale bruyante, difficile
Hypersudation nocturne
Sommeil agité
Réveils nocturnes fréquents
Position de sommeil en hyperextension du cou ou plus rarement orthopnée
Anomalies de courbes de croissance :
Infléchissement de la croissance staturopondérale chez le jeune enfant.
Surpoids voir obésité chez le grand enfant
Hypertrophie des amygdales (Grades de Friedman* et Score de Mallampati modifié**)
Le ronflement chez l’enfant est un signe d’alerte majeur, cependant tous les ronfleurs ne sont pas apnéiques.
La prévalence des ronflements primaires isolés est de 6 à 10%. Il n’existe alors aucun retentissement clinique aux ronflements.
Il existe une association fréquente entre TDAH et SAOS : Le SAOS entraînant des symptômes comparables au TDAH, il est parfois difficile de déterminer si le TDAH est un symptôme ou une comorbidité du SAOS.
Un enregistrement du sommeil systématique est donc recommandé chez ces patients.
Conduite à tenir devant une suspicion de SAOS de l’enfant :
Orientation vers un ORL formé en pédiatrie :
Réalisation d’une nasofibroscopie
Détermination de la nécessité d’un enregistrement du sommeil par polysomnographie, réalisable à tout âge.
Place de la polysomnographie dans le diagnostic :
Indispensable avant tout traitement chirugical par adéno-amygdalectomie en cas de :
Doute sur l’efficacité du traitement chirurgical : Obésité morbide, malformation cranio-faciale ou des VAS, pathologie neuromusculaire
Absence d’hypertrophie adéno-amygdalienne à la nasofibroscopie
Risque opératoire élevé (trouble de l’hémostase, pathologie cardiaque, enfant de moins de 3 ans, antécédent de grande prématurité, suspicion de SAOS sévère, SAOS de type 3)
Indispensable avant mise en place de tout autre traitement
En l’absence de ces critères, la nasofibroscopie peut suffire (Source : HAS 2012)
Interprétation des résultats de la polysomnographie chez l’enfant < 18 ans : Un index d’apnées-hypopnée obstructives (IAHO) > 1 est pathologique
IAHO compris entre 1 et 4/heure : SAOS léger
IAHO compris entre 5 et 10/heure : SAOS modéré
IAHO > 10/heure : SAOS sévère
Diagnostics différentiels
Ronflement primaire : Il n’existe alors aucune répercussion de ce symptôme.
Apnées centrales : Absence de mouvements respiratoires thoraco-abdominaux dans ce cas
Obstruction fixe des voies aériennes supérieures : Gêne respiratoire présente à la fois durant l’éveil et le sommeil. Les ronflements sont souvent absents, remplacés par un stridor.
Hypoventilation alvéolaire non obstructive : Elle concerne les patients atteints de pathologies pulmonaires chroniques ou de la paroi thoracique. Dans ce cas, il n’existe en général pas de ronflements ni de mouvements paradoxaux de la paroi thoracique.
Narcolepsie de type 1 et 2, hypersomnie idiopathique et dette de sommeil : Le temps de sommeil est significativement allongé dans ces situations et il existe une somnolence majeure. Les ronflements sont absents. Il existe des chutes du tonus musculaire aux émotions (cataplexies) dans la narcolepsie de type 1.
Epilepsie nocturne
Prise en charge
Prise en charge pluridisciplinaire, tenant compte des facteurs favorisants associés :
ORL : Diagnostic et traitement chirurgical par adéno-amygdalectomie (traitement de 1ère intention chez l’enfant).
La chirurgie est possible à partir de l’âge d’1 an
Médecin du sommeil : Diagnostic et traitement
Pneumo-allergologue : Prise en charge des comorbidités (asthme, rhinite allergique, allergies respiratoires), mise en place d’une ventilation assistée en cas de persistance d’apnées après chirurgie
Gastro-entérologue : Prise en charge du RGO en cas d’échec de traitement d’épreuve
Orthodontiste : Mise en place de traitements adaptés aux défauts de croissance faciale éventuels
Chirurgien maxillo-facial : En cas de malformations importantes du massif facial
Orthophoniste ou kinésithérapeute spécialisé en cas de nécessité de rééducation myo-linguo-faciale, afin d’obtenir une respiration nasale et un positionnement lingual adapté
Psychologue si nécessaire, en cas de trouble du neuro-développement associé
Diététicien/nutritionniste : Contrôle du poids
Médecin généraliste ou pédiatre : acteur principal et coordinateur des soins
Promouvoir une bonne hygiène de vie : activité physique régulière et suffisante, alimentation équilibrée
Promouvoir une bonne hygiène de sommeil :
Limitation de l’utilisation des écrans
Temps de sommeil adapté à l’âge, horaires des siestes, couchers et levers réguliers
Activité sportive régulière et suffisante, à distance du coucher
Absence de consommation d’excitants avant de dormir
Promouvoir une bonne hygiène nasale et le maintien des mesures permettant de diminuer le risque d’infections à répétition.
Dépister les signes cliniques de SAOS de manière systématique lors des consultations de suivi de l’enfant, en particulier entre 3 ans et 8 ans. On peut s’appuyer pour cela sur les items du carnet de santé.
Sources
Dayyat E, Kheirandish-Gozal L, Gozal D. Childhood Obstructive Sleep Apnea: One or Two Distinct Disease Entities? Sleep Medicine Clinics. 1 sept 2007;2(3):433‑44.
American Academy of Sleep Medicine, Société Française de Recherche et Médecine du Sommeil. Classification Internationale des Pathologies du Sommeil. Traduite de L’International Classification of Sleep Disorders third version. 3ème Edition. 2014.
Aubertin G, Schröder C, Sevin F, Clouteau F, Lamblin M-D, Vecchierini M-F. Diagnostic clinique du syndrome d’apnées obstructives du sommeil de l’enfant. Archives de Pédiatrie. févr 2017;24:S7‑15.
Bioulac S, Chalumeau F, Lode-Kolz K. Que faire devant un enfant ronfleur et hyperactif ? Archives de Pédiatrie. févr 2017;24:S28‑33.
Lumeng JC, Chervin RD. Epidemiology of Pediatric Obstructive Sleep Apnea. Proceedings of the American Thoracic Society. 15 févr 2008;5(2):242‑52.
Kadmon G, Chung SA, Shapiro CM. I’M SLEEPY: A short pediatric sleep apnea questionnaire. International Journal of Pediatric Otorhinolaryngology. déc 2014;78(12):2116‑20.
Marianowski PR, Monteyrol DP-J. Recommandation pour la pratique clinique : Rôle de l’ORL dans la prise en charge du syndrôme d’apnées-hypopnée obstructive du sommeil (SAHOS) de l’enfant. :48.
Séailles T, Vecchierini M-F. Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) : particularités chez l’adolescent. Médecine du Sommeil. juill 2012;9(3):110‑8.
Dauvilliers Y. Les troubles du sommeil. Elsevier Health Sciences; 2019. 457 p.
Amaddeo A, de Sanctis L, Olmo Arroyo J, Giordanella J-P, Monteyrol P-J, Fauroux B. Obésité et SAOS de l’enfant. Archives de Pédiatrie. févr 2017;24:S34‑8.
Au CT, Li AM. Obstructive Sleep Breathing Disorders. Pediatric Clinics of North America. févr 2009;56(1):243‑59.
Place et conditions de réalisation de la polysomnographie et de la polygraphie respiratoire dans les troubles du sommeil - Rapport d’évaluation. [Internet]. [cité 30 juill 2021]. Disponible ici
Place et conditions de réalisation de la polysomnographie et de la polygraphie respiratoire dans les troubles du sommeil. Texte court [Internet]. [cité 3 janv 2022]. Disponible ici
ISIDORT Programme de dépistage de l’apnée du sommeil de l’enfant. [Internet]. Isidort - Tout savoir sur le Sahos. [cité 4 janv 2022]. Disponible ici
Section on Pediatric Pulmonology, Subcommittee on Obstructive Sleep Apnea Syndrome. Clinical Practice Guideline: Diagnosis and Management of Childhood Obstructive Sleep Apnea Syndrome. Pediatrics. 1 avr 2002;109(4):704‑12.
Trang H. Syndrome d’Ondine. Archives de Pédiatrie. mai 2001;8:380‑1.